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mercredi 3 septembre 2008

Avenir de l'action extérieure : un inquiétant discours

A l'occasion de la réunion annuelle des ambassadeurs, Bernard Kouchner vient d'exposer les changements qu'il va apporter à l'organisation et aux méthodes de son ministère.

Pour le traitement des "enjeux mondiaux", une nouvelle direction générale va être créée, pour l'essentiel par récupération des moyens de la direction générale de la coopération et du développement et de la direction économique. Jusque là rien à dire.

Cette nouvelle direction générale sera elle-même, selon le ministre, organisée en quatre pôles. C'est là que les choses pourraient se gâter.

Le premier pôle chargé de la "politique d'attractivité" devra mobiliser nos atouts en matière de recherche, de technologie, d'enseignement supérieur, d'expertise technique. Il assurera la tutelle d'un opérateur extérieur au ministère, regroupant une série d'organismes existants qui assurent d'une part l'accueil des étudiants et des stagiaires en France, d'autre part l'envoi à l'étranger de nos missionnaires et coopérants techniques. Ce regroupement d’opérateurs, en raison de l’hétérogénéité de leurs activités, n'apportera probablement pas la valeur ajoutée espérée : tout juste un échelon bureaucratique supplémentaire. Mais il y a plus sérieux.

"La diversité culturelle et linguistique" sera traitée dans le second pôle, qui assurera la tutelle d'une ou plusieurs nouvelles agences à créer. Si l'on en crée plusieurs, elles perdront vite, au rythme des réductions de crédits qui s'annoncent (-20% en 2009 pour notre action culturelle) toute visibilité. Privé de la coopération scientifique et technique (situé apparemment dans le premier pôle), ce second pôle traitera, quoi qu'en dise le ministre, de la culture au sens étroit du terme : diffusion de la langue française, création littéraire et artistique.

L'environnement, l'énergie et les ressources naturelles, la santé et l'éducation seront traités dans le troisième pôle, l'économie mondiale et les stratégies de développement dans le quatrième. Et là on a du mal à comprendre. Comment travailler sur la santé et l'éducation dans un pôle, sur le développement dans l'autre? D'autant que l'éducation relève tout aussi bien du deuxième pôle (coopération linguistique) sans oublier le premier (coopération universitaire). Comprenne, et surtout agisse, qui pourra...

Que devient dans cette affaire le réseau de nos services, centres et instituts culturels à l'étranger? Dans chaque pays, ces entités seront regroupées dans un"espace France". C'est une bonne (et ancienne) idée. Mais de qui dépendront-ils? Si les hommes restent attachés au ministère des affaires étrangères comme on croit le comprendre, et si les moyens d'agir sont donnés aux agences à créer, l'on va instaurer d'une part un réseau extérieur sans moyens, de l'autre des agences sans réseau extérieur. Bonjour les querelles de bureaux et de personnes, bonjour les dégâts.

Deux autres soucis.

Bernard Kouchner annonce la création d'une direction de la prospective associant à son travail "les meilleurs représentants de l'université, des think tanks et de la société civile". Fort bien. Mais un peu ingénument, il annonce aussi que cette direction sera "le correspondant des services français dédiés au renseignement, pour ce qui concerne leurs activités d'analyse". Il y a lieu de craindre que nos chercheurs et universitaires n’accepteront pas d'être ainsi instrumentalisés.

Dernière inquiétude : l'annonce, au nom de la citoyenneté européenne, "d'un plan de transformation profonde de notre réseau consulaire européen". Déjà, indique le ministre, la suppression de consulats en Espagne et en Italie "a été saluée par le président de la Commission européenne comme un geste profondément européen". Et Bernard Kouchner insiste : " Il faudrait le faire partout. Nous allons le faire partout." Là, l'on pourrait en arriver danser plus vite que la musique. Tant que nous n'aurons pas d'état civil européen, tant qu'un fonctionnaire allemand ou grec ne pourra pas délivrer un passeport à un Français, tant qu'il faudra porter secours à un compatriote âgé ou malade en Ecosse ou en Irlande du Nord, nous aurons besoin de consulats, et de vrais consulats, pas de ces consulats dits "d'influence", fantômes de consulats, qui n'aident plus personne et qui d'ailleurs, privés de tous moyens, n'influencent plus personne.

dimanche 2 septembre 2007

la flamme et le papillon

Décidement, son envie de donner aux riches est irrésistible. Après tous les cadeaux fiscaux que l'on connaît, nous venons de le voir une fois de plus avec l'affaire de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français à l'étranger.

Durant sa campagne, il promet de rendre la scolarité gratuite pour tous les enfants des classes terminales. Après l'élection, ses collaborateurs et ses ministres lui expliquent que c'est une idée absurde qui va dresser les familles françaises les unes contre les autres. Comment accepter que tel ou tel Français exilé fiscal obtienne pour ses enfants en âge d'accéder à un lycée français de l'étranger une scolarité gratuite, alors que d'autres familles font de réels sacrifices pour des enfants à l'école primaire ou au collège, sans bénéficier, ou trop peu, d'un système de bourses calculé au plus juste?

Ce raisonnement de bon sens ne l'ébranle pas. Il s'obstine. Et nous apprenons finalement de la bouche de son ministre des affaires étrangères que dès la rentrée 2007, tous les enfants en classe terminale de nos lycées à l'étranger verront leurs frais de scolarité remboursés par l'Etat.

Quelle séduction exercent donc sur lui les gens à l'abri du besoin? que cherche-t-il à obtenir en leur offrant en toutes occasions les solutions les plus propres à les satisfaire? qu'espère-t-il du roi déchu d'une très grande entreprise française, aujourd'hui installé aux Etats-Unis sur une montagne de millions d'euros touchés en indemnités de départ, et qui se verra ainsi offrir par les contribuables français quelques milliers d'euros par an pour ses enfants scolarisés?

Nicolas Sarkozy avoue, paraît-il, sa fascination pour "les entrepreneurs qui ont réussi à la force du poignet". Mais alors pourquoi ses meilleurs amis sont-ils des gens qui se sont tout juste donné la peine d'hériter, tels les Martin Bouygues et Arnaud Lagardère? sa boulimie de pouvoir et d'action n'est-elle qu'une autre façon de courir après tous les frissons de bonheur que l'on espère de la richesse? Comme le papillon de nuit, ne va-t-il pas se brûler les ailes à force de tourner ainsi autour de cette flamme?

Pardon, nous ne sommes pas là pour faire de la psychanalyse mais de la politique. Et pour revenir à nos enfants scolarisés à l'étranger, nous disons au Président de la République qu'il vient de faire le plus mauvais choix possible. Un choix diviseur pour nos communautés françaises. Un choix humiliant pour les familles dans le besoin. Et même un choix humiliant pour celles qui voient jeter à leurs pieds un os, rien qu'un os, alors qu'elles n'avaient rien demandé.

samedi 28 juillet 2007

enseignement français à l'étranger: une ténébreuse promesse

La promesse de Nicolas Sarkozy d'instaurer dès la prochaine rentrée la gratuité pour les élèves français de seconde, de première et de terminale dans les établissements français de l'étranger est tout à fait révélatrice, à l'échelle de la communauté des français expatriés, d'une part des convictions profondes du candidat, d'autre part des ravages que celles-ci ne vont pas manquer d'entraîner, là comme en d'autres domaines.

De toutes les formules possibles pour séduire les électeurs français de l'étranger, le candidat a en effet choisi, comme en tant d'autres occasions, celle qui était la plus favorable aux riches, et la plus discriminatoire.

La plus favorable aux riches, car dans cette population d'élèves du lycée, les enfants de familles les plus démunies sont déjà titulaires de bourses, et n'ont donc rien à y gagner.

Suivent les familles à revenus moyens, non aidées, pour lesquelles l'éducation des enfants est une lourde charge, compte tenu des coûts élevés des écolages dans nos établissements à l'étranger. Celles-là seront gagnantes, et c'est justice.

Mais vient ensuite un effet d'aubaine incompréhensible pour les familles à hauts, voire très hauts revenus (pensons aux fameux exilés fiscaux, célèbres ou discrets) ainsi que pour les entreprises qui finançaient jusque là sans problème la scolarité des enfants de leurs cadres expatriés.

La plus discriminatoire aussi, car elle va créer une différence brutale de régime entre enfants français scolarisés dans notre système selon qu'ils ont atteint, ou non, le second cycle du secondaire.

Les ravages de la mesure dans nos communautés à l'étranger vont être visibles dès la prochaine rentrée, lorsque commenceront à se réunir les commissions de bourses, et que telle famille à la limite de l'éligibilité verra rejeter son dossier au moment même où tel enfant de famille fortunée se verra accueillir sans bourse délier.

Malgré ces crises annoncées, la tentation était-elle donc à ce point irrésistible de plaire toujours aux mêmes: les prospères, les puissants, les héritiers?

Question subsidiaire: d'ordinaire, lorsque l'on voit apparaître une mesure de ce type dans le programme d'un candidat, c'est qu'elle a été mûrie, portée et défendue par un parti, une association, un cercle de réflexion, un groupe de pression.

Dans cette affaire, c'est le mystère. L'idée n'était jamais apparue jusqu'à présent de financer ainsi, et de façon exclusive, le dernier cycle du secondaire à l'étranger. Le candidat n'ayant pas une connaissance intime des problèmes des Français établis hors de France, quelqu'un, forcément un notable, bien introduit dans son entourage, a dû la lui souffler.

En s'appuyant sur quels arguments, sur quelle logique? et qui donc peut-il bien être?

Peut-être un élu important des Français de l'étranger, appartenant à la mouvance politique du Président. Peut-être une personnalité dont les enfants, les petits-enfants, les neveux ou les petits-neveux pourraient se retrouver aujourd'hui ou demain bénéficiaires de la mesure.

L'on serait heureux que ce conseiller secret du Président de la République veuille bien se faire connaître. Qu'il veuille bien prendre ses responsabilités, face aux Français de l'étranger de toutes conditions et de toutes ressources. Beaucoup de choses se trouveront clarifiées. Le débat démocratique ne pourra qu'y gagner.