Clauzewitz expliquait en substance qu’à la guerre il y a un
moment où il faut payer comptant. Nous y sommes en Syrie. Trop longtemps, nous
avons un peu étourdiment tiré des traites sur l’avenir, en annonçant d’abord la
chute prochaine de Bachar el Assad (et donc en négligeant de soutenir les efforts
de Kofi Annan pour bâtir une solution politique), en promettant ensuite de
fournir aux rebelles des armes (que nous n’avons toujours pas fournies), en déclarant
enfin que ne nous ne tolérerions jamais l’usage d’armes chimiques. Ces traites
arrivent maintenant à échéance, et nous voilà bien ennuyés. On pourrait
envisager de les repousser, mais elles nous reviendraient alors plus tard, avec
des intérêts aggravés.
Nous nous préparons donc à frapper Assad et à négocier avec
celui que nous aurons frappé. C’est le sens des propos de Laurent Fabius au
Sénat : « Nous voulons à la fois sanctionner et dissuader,
répondre à cette atrocité pour éviter qu’elle ne se reproduise. Nous voulons
aussi montrer à M. Bachar Al-Assad qu’il n’a pas d’autre solution que la
négociation » et plus loin « La sanction n’est pas en
contradiction avec la négociation politique, elle en est la condition. En
effet, au nom de quoi peut-on penser que le dictateur Bachar Al-Assad reverra
sa position et se rendra à la table des négociations si aucune sanction ne
répond aux exactions abominables qui ont été commises ? ». Reste
à convaincre Assad de venir négocier une sortie de crise dont nous avons toujours
dit qu’il devait être exclu. Et de convaincre aussi l’opposition armée de venir négocier
avec Assad, ce qu’elle a toujours refusé. Ce n’est pas le plus simple à régler
de la lourde addition que nous avons accumulée.