samedi 10 janvier 2015

Charlie Hebdo : un témoignage de Paris pour nos amis américains

(traduction de l’anglais, texte paru sur le site américain Lobelog)

Pour comprendre l’émotion unanime qui s’est emparée de la population française et la soulève encore aujourd’hui à la suite du massacre qui s’est produit au siège de Charlie Hebdo, il faut garder à l’esprit que les journalistes et les caricaturistes de cet hebdomadaire étaient immensément populaires chez les Français : non comme des stars des médias, non comme d’intimidants intellectuels, mais comme des bons copains vivant pas très loin, sur lesquels l’on est toujours content de tomber au café d’à côté pour partir dans une bonne poilade, un feu d’artifice de blagues sur l’actualité française et mondiale. Plus c’est gros, mieux ça passe, il n’est plus question de bon ou mauvais goût. A vrai dire, le mauvais goût s’était imposé dès la mort de de Gaulle, avec la fameuse couverture : « bal tragique à Colombey, un mort » et est resté depuis omniprésent. Mais les plaisanteries n’étaient jamais haineuses ; même leurs pires ennemis : le Pen et sa fille, les Nazis, les néo-Nazis et tous les bigots du monde, n’étaient jamais dépouillés de leur personnalité, de leur qualité d’être humain. L’on pouvait presque croire qu’après un dernier éclat de rire, et une grande claque dans le dos, tout pourrait s’arranger.

Et ceci a fonctionné pendant plus de quarante ans. Au moins deux générations de Français ont baigné dans cet humour, non seulement à travers Charlie Hebdo, dont les premières pages étaient visibles chaque semaine dans tous les dépôts de journaux, mais aussi à travers les dessins et les chroniques (à l’humour un peu mieux bridé) que les mêmes journalistes livraient à de nombreux journaux et magazines. Wolinsky, Cabu, étaient en particulier extraordinairement prolifiques et leur coup de crayon était familier à tous les foyers français.

Les collaborateurs de Charlie Hebdo savaient bien sûr que leurs plaisanteries sur l’Islam et ses dérives pourraient leur attirer de très mauvaises plaisanteries en retour. Après l’incendie criminel qui avait frappé leur siège en 2011, ils avaient fait le choix de ne pas varier de ligne. Leur directeur, Charb, avait lâché : « mieux vaut mourir debout que vivre à genoux ». C’est ce qui est arrivé le 7 janvier dernier.

Paix à ces cœurs braves et purs… Beaucoup de grandes rigolades là-haut… et merci en leur nom pour tout le soutien qui s’est si immédiatement et spontanément exprimé à travers le monde.

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