La promesse de Nicolas Sarkozy d'instaurer dès la prochaine rentrée la gratuité pour les élèves français de seconde, de première et de terminale dans les établissements français de l'étranger est tout à fait révélatrice, à l'échelle de la communauté des français expatriés, d'une part des convictions profondes du candidat, d'autre part des ravages que celles-ci ne vont pas manquer d'entraîner, là comme en d'autres domaines.
De toutes les formules possibles pour séduire les électeurs français de l'étranger, le candidat a en effet choisi, comme en tant d'autres occasions, celle qui était la plus favorable aux riches, et la plus discriminatoire.
La plus favorable aux riches, car dans cette population d'élèves du lycée, les enfants de familles les plus démunies sont déjà titulaires de bourses, et n'ont donc rien à y gagner.
Suivent les familles à revenus moyens, non aidées, pour lesquelles l'éducation des enfants est une lourde charge, compte tenu des coûts élevés des écolages dans nos établissements à l'étranger. Celles-là seront gagnantes, et c'est justice.
Mais vient ensuite un effet d'aubaine incompréhensible pour les familles à hauts, voire très hauts revenus (pensons aux fameux exilés fiscaux, célèbres ou discrets) ainsi que pour les entreprises qui finançaient jusque là sans problème la scolarité des enfants de leurs cadres expatriés.
La plus discriminatoire aussi, car elle va créer une différence brutale de régime entre enfants français scolarisés dans notre système selon qu'ils ont atteint, ou non, le second cycle du secondaire.
Les ravages de la mesure dans nos communautés à l'étranger vont être visibles dès la prochaine rentrée, lorsque commenceront à se réunir les commissions de bourses, et que telle famille à la limite de l'éligibilité verra rejeter son dossier au moment même où tel enfant de famille fortunée se verra accueillir sans bourse délier.
Malgré ces crises annoncées, la tentation était-elle donc à ce point irrésistible de plaire toujours aux mêmes: les prospères, les puissants, les héritiers?
Question subsidiaire: d'ordinaire, lorsque l'on voit apparaître une mesure de ce type dans le programme d'un candidat, c'est qu'elle a été mûrie, portée et défendue par un parti, une association, un cercle de réflexion, un groupe de pression.
Dans cette affaire, c'est le mystère. L'idée n'était jamais apparue jusqu'à présent de financer ainsi, et de façon exclusive, le dernier cycle du secondaire à l'étranger. Le candidat n'ayant pas une connaissance intime des problèmes des Français établis hors de France, quelqu'un, forcément un notable, bien introduit dans son entourage, a dû la lui souffler.
En s'appuyant sur quels arguments, sur quelle logique? et qui donc peut-il bien être?
Peut-être un élu important des Français de l'étranger, appartenant à la mouvance politique du Président. Peut-être une personnalité dont les enfants, les petits-enfants, les neveux ou les petits-neveux pourraient se retrouver aujourd'hui ou demain bénéficiaires de la mesure.
L'on serait heureux que ce conseiller secret du Président de la République veuille bien se faire connaître. Qu'il veuille bien prendre ses responsabilités, face aux Français de l'étranger de toutes conditions et de toutes ressources. Beaucoup de choses se trouveront clarifiées. Le débat démocratique ne pourra qu'y gagner.
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